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Mes ricochets, ricocher, ricochez... de mots en mots
18 avril 2010

La belle derrière son journal

15032010

Nuit blanche dans le noir. Les secondes passent au rythme des heures, quand le sommeil se refuse et laisse place aux souvenirs. Les yeux ouverts, j'attends les premières lueurs du jours en me promenant dans l'appartement. J'ai dans le coeur l'image de ton sourire. C'était hier. Ou l'année dernière. Je ne sais plus très bien. Depuis, tu es partie, et la vie à reprit son cours. La nuit a repris sa place. Blanche. Demain, je crois, c'est ton anniversaire. Je passe de la chambre à la cuisine, ouvre le frigo pour ne rien y prendre, la faim a déserté mon ventre, seule reste la faim de tendresse qui ne peut être repue, et les crissements de mes pieds sur le parquet trop sec. Le matin, au retour de ma course dans les rues de la ville, j'amenais les croissants, achetés au coin de la rue, je faisais couler le café avant de venir te réveiller. Je te parlais de la belle, derrière son journal, les yeux rivés sur les dernières extraordinaires infos du jour, assise au fond de la boulangerie, un café fumant sur la table. Je te disais son regard que je ne parvenais pas à capter, et que parfois j'hésitais à aller lui parler. Elle me rappelait toi, dans ses dérobages. Je te parlais de la belle derrière son journal, tous les dimanches matin, tu ne l'avais jamais vue. Toi, tu restais au lit, profitais du sommeil, tu n'aimais pas la course folle de la vie que je m'imposais en ce jour de repos. Tu y préférais la langueur d'une matinée passée sous la couette, le silence de l'appartemant aux klaxons des rues matinales. Tu te rendormais souvent et, quand je revenais, tu râlais de la transpiration que je déposais sur ton corps et trainais les pieds jusqu'à la douche. Je te disais qu'elle était là, encore, ce matin, que je ne lui avais toujours pas parlé, qu'un jour je la peindrai, j'écrirai une histoire qui parlerait de son front, de ses yeux baissés, du journal qui, semaine après semaine, cachait sa bouche à ma vue. Tu râlais un peu, jalouse par principe, tu disais "tu es à moi, je ne veux pas que ton esprit s'évade dans les pensées d'une autre. Jamais." Aujourd'hui je ne suis plus à personne, et je ne suis pas retournée acheter des croissants un dimanche matin. Je te le disais, l'apétit à déserté mon ventre. Pourtant, quand on ne peut trouver le sommeil, toutes les occupations sont bonnes à prendre, et à trop penser à toi, j'en viens à me demander si elle est toujours là, si je ne l'ai pas rêvée, inventée pour t'endendre rétorquer. Je m'imagine sa voix, le clignement de ses paupières, la forme de ses lèvres. Je me crée des souvenirs, j'invente et m'en contrefiche. Toi qui lisais Pascal, tu dois me comprendre mieux que quiconque, lorsqu'il écrivait "Un plaisir vrai ou faux peut remplir également l'esprit: car qu'importe que ce plaisir soit faux, pourvu que l'on soit persuadé qu'il est vrai". Je n'ai même pas besoin de m'en persuader, je prends comme une aubaine chaque pensée qui ne me ramène pas à toi, efface ne serait-ce qu'un peu ton visage de mes rétines. C'était hier ou l'année dernière, quand tu es partie sans te retourner. C'était le matin. Un matin comme celui-ci, et le soleil se lève, dehors, il pointe le bout de son nez avant même que la lune n'ait réussi à fermer mes paupières. Alors j'enfile mes baskets, un t-shirt, et je me dis que peut-être. Peut-être qu'elle sera là. Je te parlais de la belle derrière son journal. Aujourd'hui, peut-être, lui parlerais-je de toi.

Un texte qui m'a été inspirée d'une phrase, au milieu d'un commentaire, en réponse à un article que j'avais aimé. 

http://www.jeuxdedames.net/article-nuit-blanche-et-noire-46650389.htm

 

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